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Les billets du Père Lucien Marguet
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9 mars 2014

Du Carême à Pâques…

Chaque année, le Carême est un temps fort pour les chrétiens avant de célébrer la mort et la Résurrection de Jésus-Christ qui est le cœur de leur vie chrétienne. Avant de commencer sa vie publique et missionnaire, Jésus se retire seul pendant 40 jours, à l'image des 40 ans de désert des Hébreux à leur sortie d'Egypte, sous la conduite de Moïse à qui Dieu a confié la mission de libérer son Peuple qu'il ne supporte plus de voir souffrir des vexations et des coups dont l'accablent les Egyptiens.

 Or, si ce peuple hébreu a retrouvé sa liberté, il est éprouvé au désert par la faim et la soif, le manque de tout. De ces Hébreux habitués à vivre sous la coupe de leur chef, Moïse doit faire un Peuple uni par des lois, des attitudes et des coutumes communes, désireux de cohésion pour progresser dans la même direction. Cela suppose de la part de ces Hébreux qu'ils laissent leurs regrets du passé et envisagent désormais leur Avenir dans la terre de leurs lointains ancêtres en terre de Canaan où coulent le lait et le miel. Cette traversée du désert sera pour eux un espace et un temps de purification et de conversion, de probation de leur attachement au Dieu d'Abraham et de Jacob.

 Jésus a vécu 40 jours de retraite au désert durant lesquels il a été tenté d'abandonner la mission risquée confiée par Dieu. Ce temps d'épreuves dans le manque, la solitude, le silence, donne l'occasion à Jésus de réaffirmer que "sa nourriture, ce qui le fait vivre, c'est de faire la volonté de son Père"…

 Mais n'est-il de déserts que ceux de rochers, de pierres, de sable et de manques de vivres et de vie, d'étendues illimitées ? Non, car le désert ce peut être dans la vie une étape traversée à un moment de cruel conflit, de séparation, de longue maladie. Or qui traverse ce désert-là en sort différent, ayant rebattu autrement les cartes des "essentiels". Dans la vie, le désert ce peut être aussi une crise morale et spirituelle comme un effacement des repères, un affaissement des fondations, une perte de goût et de sens à la vie, une sorte d'acédie qui paralyse tout l'être. Les réveils quotidiens sont alors sans élan, les journées sont très longues, sombres et nuageuses. Le désert, ce peut être aussi un deuil dont les dégâts dans la vie des vivants n'en finissent pas de faire atrocement souffrir. Les plaies ne se referment pas et parfois isolent, renferment, plombent les relations. De cette traversée éprouvante, véritable désert, qu'est le deuil après la mort éprouvante d'un être cher, nul ne sort indemne. Comme une pièce rougie au feu et forgée sur l'enclume, le départ définitif, parfois précédé d'un long et dur combat contre le mal, martèle les vivants de coups saccadés et répétés.

Ayant en tête tous ces déserts possibles de la vie, je nous souhaite, à nous chrétiens, un temps de Carême "fructueux". En ce temps l'Eglise nous propose de jeûner, sans forcément aller jusqu'à faire la grève de la faim ni un régime ! Elle invite à partager en se privant du superflu. Elle appelle à pardonner et se convertir, à recevoir le Sacrement du Pardon. L'Eglise bat le rappel de celles et ceux qui se disent chrétiens pour qu'ils mettent de l'ordre dans leur vie en redonnant aux "essentiels" leur vraie place et en se délestant de ce qui est accessoire et superficiel. Carême, c'est l'occasion de faire une "révision de vie", seul ou avec d'autres, d'ouvrir la Bible, de retrouver plus régulièrement des moments de rencontre, dans la prière, avec le Christ mort et ressuscité, vivant parmi nous et en nous par son Esprit. Jeûner, prier, partager, se réconcilier : quatre points de repères pour vivre le Carême.

 Pour redevenir un Peuple fort et fier, debout et en ordre de marche, il a fallu aux Hébreux traverser les épreuves du désert du Sinaï. Que le Carême qui commence par les "Cendres", signe du regret de nos égarements et de notre désir de nous améliorer, soit pour nous et nos communautés paroissiales l'occasion de progresser, vraiment !

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