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Les billets du Père Lucien Marguet
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22 mars 2015

La prière animée par des "baptisés"

En arrivant dans le Vouzinois, je redécouvrais combien les villages sont nombreux, de petite taille et éloignés les uns des autres ; que la majeure partie de la population est âgée et que les jeunes partent étudier et travailler dans les villes, quitte pour certains à revenir s'installer en rural après.

J'ai pourtant découvert que le monde agricole et celui de l'élevage avaient une grande capacité à surmonter les difficultés rencontrées dans leur profession. Je pense aux fermes dont la surface cultivée est restreinte. Elles inovent en créant des activités complémentaires : les poulaillers pour les œufs ou la viande, la vente en direct, les fruits rouges, la vente de légumes à la ferme.

Le Vouzinois, c'est connu, n'a pas de réseau routier à la hauteur de ses besoins : pas de grands axes, que des départementales et des communales. Plusieurs bourgs attractifs, mais pas de ville qui s'impose vraiment : Vouziers compte aujourd'hui à peine 4000 habitants. Toutefois ce chef-lieu est situé vraiment au centre de l'arrondissement, ce qui peut inciter et favoriser les alliances entre les cinq paroisses qui la composent.

Dans le même temps où je découvrais cette poussière de communes, j'entendais des habitants me dire qu'il ne se passait plus rien chez eux et que écoles et commerçants avaient déserté, qu'il leur fallait à chaque instant et pour tout prendre leur voiture. L'Eglise n'était pas la dernière à "recentrer" la pratique religieuse sur quelques centres relais. Les prêtres étaient ainsi comparés au boulanger et à l'épicier qui feraient de temps en temps une tournée dans les communes pour fournir leurs prestations.

Or il m'est vite apparu que cette vision était faussée. Car, dans le domaine de la foi, chacun est porteur de son baptême qui le fait être "prêtre, prophète et roi". Chacun non seulement peut vivre de sa foi dans son quotidien, mais a reçu mission d'en faire part et d'y associer ses voisins. Cela se traduisait ainsi dans ma tête de pasteur : ce n'est pas le prêtre qui apporte Dieu dans les villages, puisqu'Il est déjà présent au cœur de la vitalité des liens conjugaux, familiaux et sociaux et que être chrétien consiste à Le reconnaître, Le prier et L'aimer. Je découvrais que, sur les plans professionnel et communal, les gens s'organisaient bien, prenaient des initiatives (coopératives, cumas, fêtes, vide-greniers, etc…) mais que sur le plan ecclésial ils attendaient tout des prêtres.

Il nous fallait donc redonner confiance à ces quelques chrétiens et leur redire qu'étant membres du Corps du Christ, ils étaient chargés aussi de Le faire vivre là où ils habitent. Leur église ne serait ainsi plus inutilisée. Elle redeviendrait le lieu de la prière programmée et animée par eux-mêmes. Les manifestations religieuses ne dépendraient plus tant de la disponibilité ou non des prêtres que de leurs propres concertation et décisions locales.

Ainsi a été suggéré le Chemin des crèches avec propositions de temps de prière dans les villages, les mardis de Carême avec partage de l'Evangile du dimanche, soupe et offrande au C.C.F.D., le chapelet pendant le mois de mai et enfin une célébration remplaçant les messes de fêtes de saints patrons. Il est aussi suggéré aux relais d'ouvrir les églises le plus souvent possible et d'en faire la visite guidée aux enfants du village.

Développer cette logique de présence d'Eglise nous faisait un devoir pastoral de formation à la prière. C'est ainsi que nous avons demandé au Père Arnaud Toury d'animer trois rencontres sur la prière personnelle et communautaire. Nous poursuivrons d'ailleurs en 2015 cette formation par un cycle de trois rencontres sur la liturgie.

Bien sûr, si la poignée de chrétiens d'un village ne se sent pas assez solide pour envisager toutes ces animations, elle peut, elle doit chercher des associés sur d'autres villages. Ce qui contribue aussi à renforcer les liens entre chrétiens de la paroisse et redonne le goût de re-trouver le chemin de la messe dominicale à la paroisse. Un des bénéfices de ces "prières" entre baptisés est la visibilité de l'Eglise qui s'affiche à la suite des catéchistes qui proposent la foi aux enfants, des personnes qui accompagnent les familles en deuil, des bénévoles du Secours Catholique qui cheminent avec les plus pauvres.

A partir de cette réappropriation de la "prière", on peut penser que des initiatives de fraternité seront prises par les chrétiens au cœur même de la vie des communes.

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