Ce sont les baptisés qui font vivre l'Eglise

Un jour une personne sage et sensée m'a posé cette question : "Pourquoi notre église ne rassemble-t-elle plus jamais de chrétiens alors que ceux qui l'ont voulue l'ont construite pour cela ?" Depuis ce temps où les villages se sont dotés d'une église, à côté d'une mairie et d'une école, le paysage rural a beaucoup changé. Il n'est point besoin de redire à quelles évolutions nous continuons d'assister. Chacun les connaît, parfois les regrette, tandis que certaines sont appréciées.

 Si par bonheur les séminaires se remplissaient et les ordinations de prêtres redevenaient nombreuses, devrait-on commencer à redire des messes dans chaque village pour légitimer la présence de chaque église ? L'urgence me semble plutôt être d'aider les chrétiens à devenir ensemble une "communauté de croyants", y compris dans les villages les plus petits et reculés. Car l'Eglise existe là où habitent des chrétiens en lien les uns avec les autres et reliés à une paroisse ou une association de fidèles laïcs.

 Comment se perçoit cette foi ? Par la parole, les actes, les engagements des chrétiens dans leur milieu social, familial, professionnel et communal, la lumière de l'Evangile, sans ostentation, est diffusée. Au travers des attitudes et des comportements humains qui se distinguent parfois de la culture ambiante et des coutumes habituelles, l'on va deviner que telle ou telle personne du village a d'autres sources d'inspiration et d'action. Cela est entendu, mais il faut aussi souhaiter à ces "chrétiens" convaincus qu'ils puissent dire leur foi religieusement, en  Eglise et dans l'église de leur village qui existe pour cela ! Mais alors, comment et en quelles occasions ? Ces manifestations religieuses de la foi au cœur même des villages les plus éloignés des centres, qui doit se charger de les animer, puisqu'il n'y a plus ces prêtres qui autrefois venaient les assurer ?

 Ce sont les baptisés eux-mêmes, en se faisant aider pour en préparer le déroulement. En réclamant un soutien de chrétiens d'autres villages qui recèlent peut-être des talents complémentaires ! C'est d'ailleurs ainsi que se créent des liens d'amitié et de foi et que se tissent de petites communautés relais de proximité dans le cadre de la communauté paroissiale.

 Ces occasions de faire vivre l'Eglise priante au cœur des villages, on les connaît. Je les énumère une fois de plus :

Une crèche installée dans l'église ou sur le parvis est l'occasion de rappeler que Dieu a voulu habiter parmi nous. Proposer aux enfants du village de découvrir l'architecture, les sculptures, les vitraux, la vie du Saint Patron de l'église, c'est faire œuvre de culture enrichissante. Le Chemin de Croix en Carême, le chapelet au mois de mai, une célébration pour les morts des guerres et ceux du village dans l'année. Un concert qui accueille une chorale ou un groupe musical offre aux habitants un moment de beauté et de convivialité.

Bien sûr, la fête du village au cours d'une année peut commencer par un moment de prière orchestré par des chrétiens du village et des invités alentour.

Est-il besoin de redire que les mariages et obsèques se célèbrent souvent au village ? Il est vrai qu'il existe des réticences à voir des laïcs se retrouver dans le chœur d'une église à mener la prière. On a été tellement habitués à ce que cette place soit réservée au prêtre !

D'ailleurs on a raison de souhaiter que ces "célébrations de prière" se déroulent toujours avec un lien explicite avec la paroisse et en particulier le curé, chargé de la cohésion entre toutes les cellules d'Eglise, certes autonomes mais surtout pas indépendantes. Car si la paroisse ne doit négliger aucune initiative religieuse locale, celle-ci ne peut s'envisager et tenir dans la durée qu'à la condition d'être en bonne relation avec les acteurs pastoraux, diacres et prêtres, mais aussi les membres des EAP sollicités à accomplir ce service d'unité et de vitalité.