Le piège des étiquettes

Je me méfie beaucoup des "étiquettes" collées sur les personnes et les groupes par facilité. Elles prétendent définir et faire connaître, alors que très souvent elles ne font que colporter des préjugés ou des informations en pratiquant amalgames et confusions.

Quand on dit de quelqu'un qu'il est athée et de cette autre personne qu'elle est croyante, a-t-on réellement levé le voile qui couvre leur for intérieur ? A quel Dieu celle-là ne croit-elle pas ? Et en quel Dieu celle-ci met-elle sa foi ? Leur croyance ou incroyance a-t-elle des incidences sur leur existence ? Ou n'est-elle qu'un visage qu'elles se façonnent en fonction du regard de leurs relations de milieux ? Les degrés d'appartenance et d'engagement n'apparaissent pas toujours convenablement dans les classements que l'on a trop tendance à effectuer dans les domaines religieux.

Cette tendance à globaliser et à éviter d'approfondir et de préciser, on la retrouve en politique. L'un annonce qu'il est de gauche en prétendant ainsi faire comprendre qu'il est sensible à la justice et à la fraternité. Mais c'est une étiquette qu'il se donne car, à vérifier, sa vie est occupée par des activités plus financières que solidaires et altruistes. La logique de son existence, de ses choix et de ses orientations est même plus inspirée par celle du libéralisme, doctrine selon laquelle chaque individu est seul maître de sa destinée.

Cette autre personne se positionne à droite et risque ainsi d'être vue par les gens se disant de gauche comme soumise à la propriété et aux biens matériels individuels, partisane de la manière forte dans les rapports citoyens, âpre au gain, voire cupide et désintéressée du Bien commun. Alors qu'à voir de près sa façon de vivre on peut s'apercevoir qu'elle est impliquée dans du bénévolat au service des faibles ou des pauvres, qu'elle est membre d'une association d'entraide internationale.

Au-delà des apparences et des affichages, il y a en chacun(e), en chaque groupe, une vérité cachée, un sens et un projet qui se déclinent à travers des actes qu'aucune étiquette ne pourra jamais, vraiment, faire deviner !

Certes on peut aussi être tenté de se coller soi-même une "étiquette" pour se distinguer et se positionner face à un interlocuteur qui vous submerge des flots de ses convictions et de ses affirmations péremptoires dans le but de faire barrage à son intrusion. On peut aussi coller une étiquette sur un adversaire pour éviter d'avoir à le mieux connaître et de rechercher les raisons de son positionnement.

Cette pratique qui consiste à classer les gens, les peuples, les groupes, dans des registres, des tiroirs, des étagères, par catégories différentes, empêche de découvrir la singularité et la particularité, la complexité, la richesse de la diversité humaine. Au fond, cette tentation de raccourci facile et réducteur prive celui qui le pratique du bonheur de progresser dans le champ de la vérité.