L'Eglise en "sortie"…

L'Eglise n'a jamais eu vocation à rester en ses murs, mais toujours à "sortir" et aller à la rencontre de toutes les régions, peuples et cultures qui font ensemble l'Humanité. D'ailleurs, par ses membres insérés et impliqués en des lieux et avec des liens divers et différents sur la surface de la Terre, l'Eglise est engagée dans la progression de l'Histoire. Elle mouille sa chemise à travers ses œuvres et ses membres vivant au milieu des réalités, des combats et des débats du Monde. L'Eglise prend la parole et position, réagit et agit, dénonce et propose, expose ses points de vue. Le groupe de ceux et celles dont la vie s'inspire à la source évangélique y trouve une force spirituelle et une énergie vitale pour "sortir" de soi, initier des engagements et tenir dans la durée.

Cela exige de la part de l'Eglise qu'elle fournisse aux membres de la communauté la conscience de leur vocation et les moyens d'y répondre. Beaucoup de chrétiens exerceront leur profession comme un lieu et un temps de révélation de l'Evangile auquel eux-mêmes se réfèrent pour discerner et juger des choix et des engagements de leur vie. D'autres choisiront de témoigner de leur foi, de l'Espérance et de la charité à travers un engagement dans une association ou une implication attenante à leur situation sociale, professionnelle ou familiale. Ainsi tous ces membres chrétiens, conscients d'être Eglise ensemble, comme les membres le sont d'un même corps, tout en ayant des fonctions et des charismes différents donneront chacun une image de l'Eglise embrayée à la marche du Monde.

Bien sûr ce que je suis en train de souligner suppose que mes lecteurs aient une vision juste de l'Eglise, inclusive de tous les chrétiens qui la composent. Si la parole de l'Eglise doit être claire, à la portée des oreilles et des cœurs de tous, de la part de ceux qui ont l'autorité pour exprimer son point de vue, elle doit aussi provenir des chrétiens qui la rendent pertinente et féconde sur les terrains qu'ils habitent. Une parole, fût-elle fertilisante, peut demeurer stérile si elle est enfermée dans des textes hermétiques ou des tiroirs fermés à clé. "Sortir" demande donc de la part de l'Eglise que ce qu'elle dit, fait et propose, conseille, soit audible et praticable !

Etre en sortie ou de sortie, pour des chrétiens, n'est pas forcément aller loin de chez soi, mais c'est développer un désir de s'ouvrir aux autres différents et d'écouter, d'entendre ce qui les fait vivre, et, dans une réciprocité, de leur partager ce qu'ils sont, ce qui motive et anime, fait tenir debout et en marche leur vie. Car on ne peut vraiment rencontrer les autres et en tirer bénéfice que si l'on accepte de recevoir d'eux. Des grands-parents ne feront passer des messages auprès de leurs petits-enfants qu'à la condition de s'être intéressés gratuitement et avec bienveillance à ce qui les passionne ou les inquiète !

"En sortie", certes c'est parfois se distinguer, s'opposer, contredire, résister, se décaler, c'est bien sûr aussi exprimer, attester et témoigner, toujours avec sincérité et clarté, respect et même déférence pour les vérités alternatives. Sans doute l'Eglise, ses membres, sont-ils trop souvent muets ou réticents à rendre compte de leur foi, par peur d'être jugés, mal compris ou marginalisés. Il y a aussi trop de croyants dans l'incapacité d'exprimer avec justesse les bases et les raisons de leurs convictions. Certains aussi, par pudeur, n'expriment pas facilement leur attachement à l'Evangile et au Christ. Ils laissent à leurs interlocuteurs le soin de humer à travers ce qu'ils confient d'eux-mêmes l'odeur du Berger qui guide leurs pas.