La joie de l'Evangile

Il arrive parfois que l'on soit découragé par les difficultés rencontrées et, dans l'Eglise, interloqués par le nombre de baptisés qui la désertent et les jeunes générations qui ne s'intéressent guère à ses messages ! La déception génère alors en nous la tristesse qui érode les trois grandes vertus théologales qui sont pourtant la marque de l'Evangile mis en œuvre : la foi, l'espérance et la charité.

Le pape François a intitulé sa première longue prise de parole "La joie de l'Evangile". Or, si nous restons à regarder ce qui "disparaît" et "évolue" malgré nous dans les paroisses, nous risquons en effet de nous lamenter. A l'inverse, si nous "sortons" pour aller retrouver ce que continue à accomplir l'Esprit Saint chez les humains dans le déroulement de leur histoire, alors nous recevons la joie réconfortante lorsqu'il nous est donné de contempler la puissance de la vie, de l'amour, l'énergie des recommencements après des échecs ou des égarements… ce qui revient à constater que ce ne sont pas les chrétiens eux seuls qui détiennent l'Evangile et que leur mission consiste à le transmettre.

Les chrétiens ont aussi à discerner dans l'univers et l'humanité les traces et le souffle de la présence active de Dieu. Les gens de bien qui n'agissent pas en se référant explicitement à Dieu mais du fait de leur connivence naturelle avec la vérité et avec la bonté méritent de notre part admiration et gratitude, car ils font partie de la carte de relations des amis du Créateur et Père de la Vie et de l'Amour. Il nous faut donc non seulement sortir de ce schéma de croyants chargés de donner à ceux qui, non croyants, n'ont pas, mais aussi élargir le cercle des enfants aimés de Dieu parmi lesquels certains en ont clairement conscience tandis que d'autres le sont vraiment sans le savoir ou l'exprimer. Dans tous les cas, nous sommes conviés à la joie. Il est donc souhaitable de ne pas contempler les fruits de mon jardin et de me croire seul à pouvoir les partager, mais d'accepter aussi que mes voisins me partagent les leurs, même s'ils me font savoir que ce n'est pas chez mon grainetier qu'ils se sont approvisionnés ! Les chrétiens ne s'imaginent-ils pas trop être les seuls à détenir le trousseau de clés du bien, du beau, du juste, du bon et du vrai ?

Un jour les proches de Jésus lui rapportent qu'ils ont vu des gens, étrangers à leur groupe, accomplir des miracles, et ils demandent à Jésus ce qu'il en pense. Jésus répond que ceux qui n'agissent pas contre lui sont de son côté. Ainsi Jésus invite-t-il ses disciples à élargir leur regard au bien qui peut être positivement réalisé par d'autres que ceux qui le suivent et écoutent sa parole. Il me semble que le pape François appelle les chrétiens à ouvrir les yeux sur le monde et pas seulement sur l'Eglise pour discerner les désirs, les aspirations, les quêtes et aussi les initiatives créatrices de vie, de bien, d'amour, de liberté, de responsabilité… et y trouver convergences et terrains de rencontre et d'action entre ceux qui croient au ciel et ceux dont ce n'est pas l'immédiate préoccupation.