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Les billets du Père Lucien Marguet
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14 juin 2018

Dans une société hyper-marquée par l'affectif…

Pour certains, l'humain c'est d'abord exercer sa raison et composer avec le réel. Pour d'autres, l'humain se caractérise par la sensibilité, l'émotion, d'une façon générale une vie émotionnelle que permet l'affectivité. Donnant ainsi la priorité au "ressenti", telle personne dira volontiers d'une autre personne : "je l'aime bien, elle me plait bien", avant d'évoquer ensuite les convictions qui l'en distinguent.

Dans cette atmosphère où l'affectif a priorité sur ce qui est objectif et rationnel, faire naître des relations et les entretenir peut consister surtout à rechercher de conquérir par un jeu, souvent inconscient, de séduction et de soumission. Dans ce registre des sentiments, le fait de plaire, de se faire apprécier et approuver, passe toujours avant la recherche d'une vérité. D'une relation d'assistance, on dérive souvent à celle de la dépendance. On devient partisan ou l'on rejette brutalement celui dont on se sent redevable. Dans ce genre de relation basée sur l'affectif, l'altérité et les différences, les nuances sont à gommer, car seules la fusion, la similitude et la ressemblance y sont recherchées tandis que la distinction et la distance sont redoutées.

Or à force de vouloir toujours et à tout prix être en accord, on finit par se méconnaître réellement et un jour "se réveiller" très éloignés et même opposés. A mon avis, s'il est très souhaitable de s'estimer, ce n'est qu'à travers les différences et même les éloignements connus et reconnus que l'on pourra parler de vraie considération et même d'attachement mutuel. Ainsi la vertu de "prudence" doit-elle être invitée à paraître dans l'expression de nos relations aux "autres" estimés en ce qu'ils sont réellement. Par exemple embrasser toutes les personnes venues pour une réunion me semble ne pas assez tenir compte du ressenti particulier de chacun devant cette façon de saluer. Je suis convaincu que pour éviter de convoquer à la réunion ce registre affectif, il faut au contraire commencer par souligner la légitime distinction des points de vue et leur respect par chacun des participants.

Certains signaux peuvent diffuser des appels à la complicité, à la soumission, et déjà de la part de ceux qui les lancent des intentions d'appropriation et de dépendance. Attribuer trop de charges et de responsabilités à quelqu'un d'une façon exclusive et solitaire, c'est courir le risque que cette personne s'approprie ce qui lui a été confié et en fasse un tremplin pour dominer et parfois manipuler les autres !

Certes les prêtres, les religieux et religieuses ont fait vœu de célibat. Mais ils n'ont pas renoncé à aimer et donner de leur temps et de leurs capacités pour servir, soutenir et parfois guérir moralement et spirituellement la vie de leurs frères et sœurs en humanité ! Or ils n'accomplissent correctement cette mission qu'en passant par la liberté et l'autonomie affirmées de ceux dont ils ne seront jamais que les serviteurs, itinérants et transitoires.

C'est au cœur de ce don gratuit et gracieux de ce qu'ils sont que les prêtres trouvent la joie de contribuer à la vie de ceux et celles qu'ils accompagnent, par exemple des couples vers leur mariage, des parents vers le baptême de leurs enfants, des enfants et des jeunes dans la construction de leur avenir, des familles éprouvées par le deuil et la perte d'un être cher…

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