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Les billets du Père Lucien Marguet
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3 août 2020

19ème Dimanche du temps ordinaire (Année A)

9 août 2020

1er Livre des Rois 19 9a-21-23a - Romains 9 1-5 - Matthieu 14 22-33

 

Dans la séquence qui précède celle que nous venons d’entendre, on avait vu Jésus essayer de s’échapper pour aller au désert méditer et prier. Etre seul, à distance des foules. Or, voilà que, lorsqu’il débarque, elles l’attendaient. Alors il en a pitié et change son programme.

Il passe des heures à guérir et s’occuper de leur vie. C’est ensuite la multiplication des pains, mais cette fois, c’est décidé, après avoir nourri cette foule accourue le rejoindre, il la renvoie non sans avoir suggéré aux disciples de partir, eux aussi, sur l’autre rive. « Le soir venu, il était là, seul. Sur la montagne. A l’écart pour prier ».

Jésus recherche la solitude, le désert, le silence, l’écart, la distance. S’il sait s’approcher, côtoyer, accueillir, écouter, il sait aussi « être seul ». Ceci ne conditionne-t-il pas cela ? D’un côté, Jésus seul. De l’autre, les Apôtres sur le lac qui vont tout à tout se sentir isolés et prendre peur. La solitude refait les forces intérieures. L’isolement les détruit.

L’une des grandes aspirations aux congés d’été n’est-elle pas de pouvoir prendre de la distance, rompre le rythme quotidien ? Etre seul. Vivre. Respirer. Réfléchir, méditer, prier. Après une année d’intense activité, pouvoir enfin déposer agenda, montre, réveil, horloge. Savourer le temps donné. Découvrir au fond de soi l’hôte intérieur que nous avons peut-être oublié. Reprendre conversation avec Lui. Au travers l’immensité de la mer, un soleil couchant, contempler et accueillir la splendeur du créateur. Choisir une solitude pour se retrouver. Pour retrouver confiance en soi. Dans les autres. En Dieu.

On peut être seul et avoir une carte de relation nombreuse et très diversifiée. Et cette solitude d’une vie peuplée d’amis n’a rien à voir avec l’isolement qui, lui, est étouffant et pesant, mortel. L’isolé est ignoré. Il n’a personne à qui parler, à qui penser. Il est comme enfermé. La solitude, elle, permet de vivre relié spirituellement à Dieu, à de nombreuses personnes dont on a partagé les joies, les peines, les projets... Cette solitude-là est habitée. Elle est une richesse et une grâce. Dans notre diocèse, nous avons 4 communautés chrétiennes contemplatives. En parlant souvent avec elles, je suis toujours étonné de la diversité et de la profondeur de leurs relations.

Certes je pense à l’épreuve de l’isolement dont font part certains jeunes croyants dans leur classe, leur groupe de copains. Lorsque Sylvie avait annoncé à ses amies qu’elle préparait sa confirmation, ce fut un grand moment d’étonnement... Sylvie a pu justifier son choix. Aujourd’hui, tous respectent sa foi. Il faut à ces jeunes du cran et de la simplicité pour oser témoigner que l’on croit en Dieu. Au milieu des tempêtes du monde, la foi des croyants peut chavirer. Quand surviennent des événements douloureux, le doute, la révolte, peuvent nous gagner.

Ainsi, les communautés chrétiennes d’Algérie peuvent être minuscules, vivre une vraie solitude et en réalité n’être pas isolées. Lorsqu’on demandait au Père Claverie, évêque d’Oran, les raisons qu’ont les religieux de rester en Algérie, il évoquait toujours ces liens très forts aux amis que pas même les risques et menaces ne pouvaient détruire. Les chrétiens de Chine n’oublient jamais de dire leurs liens de citoyens avec leur patrie.

N’est-ce pas d’une poignée d’apôtres investis par l’Esprit Saint que l’Eglise naîtra, il y a quasi 2000 ans de cela ? Le Christ confie l’Eglise naissante à cette poignée d’hommes. Cette même confiance suscitée en Pierre pour avancer sur les eaux et lui donner d’oser fera de lui le premier Pape de l’Eglise. Oui ! N’est-ce pas ce lien de la confiance dans la foi que l’on retrouve chez les Apôtres lorsqu’il les rejoint en cours de traversée ?

Au milieu de la tempête, Jésus leur manque, ils se sentent abandonnés. Une foi qui doute : « c’est un fantôme ». Jésus ne serait-il pas une illusion ? Ils ont besoin d’être rassurés.

Jésus pressent leur isolement : « Confiance, c’est moi, n’ayez pas peur ». Et lorsque Jésus est à nouveau physiquement présent, identifié, reconnu, les Apôtres se retrouvent en sécurité. N’est-ce pas là l’itinéraire spirituel par lequel devront passer les Apôtres : de la présence physique de Jésus devant eux à la présence intérieure en chacun après la Résurrection...

Quand Jésus les aura quittés après l’Ascension, les Apôtres seront seuls. Mais d’une solitude habitée par l’Esprit Saint.

On a parlé de la solitude du croyant. Passer d’une forme de foi, possession par les sens, à la pauvreté et l’épreuve du dépouillement par le désert des sens. Jésus vient à nous, se fait sentir de sa propre initiative, comme ce jour-là en venant sur les eaux vers les Apôtres.

N’avons-nous pas parfois besoin de signes, de visibilité, de présence, de paroles... pour étayer notre foi, et, par contre, à d’autres moments, besoin de désert, de solitude, de silence, de retrait pour retrouver le Christ dans une relation intime, personnelle, intérieure... Le Christ présent par son Esprit en notre vie. Ces longs moments passés par Jésus dans la solitude avec son Père le ressourçaient pour aller à la rencontre des humains. Oui ! Le Christ, cet hôte intérieur, premier né d’une multitude de frères, nous renvoie aussi vers eux.

Or le temps des vacances n’est-il pas un temps donné pour nous retrouver en famille au lieu de nous croiser au hasard d’un petit déjeuner avalé l’œil sur la pendule, à cause du temps ; s’écouter et non plus s’entendre partir ou arriver ; partager ses rêves, ses lectures, ses questions au lieu de mettre un billet sur le frigidaire ; partir se promener ensemble au lieu de « s’envoyer promener » parce qu’on a tellement peu de temps pour son propre chemin qu’il serait illusoire de penser qu’on en a pour les autres.

Alors, à la croisée des chemins, dans une marche en forêt ou même en regardant un reportage à la télévision, nous trouverons celui qui a toujours le temps de nous écouter, de nous enseigner (par sa Parole), de nous nourrir (par son Pain), de nous guérir (par son Pardon), et qui nous dit : « Confiance, n’ayez pas peur, c’est moi ».

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