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Les billets du Père Lucien Marguet
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27 août 2022

21ème Dimanche (C)

21 août 2022

Fête de St-Eloi à Servon-Belzicourt

Isaïe 6618-21 - Hébreux 125-7-11-13 - Luc 1322-30

  

Quelqu'un demanda à Jésus : "Seigneur, n'y aura-t-il que peu de gens à être sauvés ?" 

Les textes d'aujourd'hui portent sur le salut. D'après l'Evangile que nous venons d'entendre, ce ne sera pas sans conditions. Le salut n'est pas automatique. Et il y aura des surprises : "Oui, il y a des derniers qui seront premiers et des premiers qui seront derniers"

Mais au fait de quoi Jésus nous sauve-t-il ? De quoi nous libère-t-il ? Quand on réussit dans la vie : profession, reconnaissance sociale, couple, famille, bonne santé, quand on a tous les moyens pour vivre, quand on est comblés par la vie, de quoi Dieu pourrait-il donc encore nous sauver ? "Je n'ai pas besoin des autres", dit l'un. "Je n'ai pas besoin de Dieu", dit l'autre. "Je me suffis à moi seul, puisque j'ai tout". Le rêve de toute puissance, d'indépendance radicale, du moi sans les autres nous guette. L’athéisme foncier, c’est la prétention à l’autosuffisance radicale. 

Il est vrai que c'est souvent dans les moments les plus difficiles, aux carrefours des épreuves, que l'on redécouvre combien la relation aux autres est précieuse, que l'on se souvient que Dieu existe. En effet n'est-il pas dans l'illusion, celui qui prétend n'avoir besoin de personne parce que tout lui réussit dans la vie ? N'est-il pas en train de se tromper, celui qui se croit comblé, rassasié ? Celui qui se déclare complètement indépendant et sans liens ne risque-t-il pas d'aliéner sa capacité de relation, de sentiments ? Un coeur, une conscience que l'on ne s'exerce pas à donner, à ouvrir, ne vont-ils pas à la longue se rétrécir et s'atrophier ? L'orgueil, l'égoïsme, la cupidité, la mesquinerie ne finissent-ils pas par parasiter des existences tournées exclusivement sur elles-mêmes, sans horizon ? N'ont-ils pas un grand besoin d'être sauvés d'eux-mêmes, ceux dont la vie semble se satisfaire à elle-même et s'auto-alimenter ? 

Or Jésus vient sauver l'homme des pièges dans lesquels il se prend lui-même. Etre sauvés, c'est consentir à ne pas trouver qu'en soi les forces pour avancer, et, dans la foi, c'est accepter de se ressourcer dans le Christ et son Evangile. Je dis donc à ces gens : "Etes-vous donc si sûrs de n'avoir jamais besoin ni des autres ni de Dieu ?" 

Mais je leur dis aussi :"Vous n'avez pas besoin de Dieu, mais si Dieu avait besoin de vous ?" 

Il y a quelque temps, un paroissien se plaignait de son curé à l'évêque de son diocèse. Il lui disait : "J'ai l'impression que mon curé se prend pour le bon Dieu". Il déclarait à travers cette formule la fâcheuse tendance de son curé à "tout décider tout seul sans qu'on n'ait rien à dire", comme si ce curé n'avait besoin de personne. Or l'évêque eut cette réponse : "Vous êtes peut-être injuste à l'égard de votre curé ! Vous êtes plus certainement encore injuste à l'égard du bon Dieu". 

Il est vrai que nous imaginons Dieu, le plus spontanément, comme un être solitaire qui n'a besoin de rien ni de personne. Pleinement satisfait de lui-même, enfermé dans sa propre perfection. Il ne laisse aucune place à personne d'autre. Il est lointain, indifférent et distrait. Cette caricature de Dieu apparait parfois en "arrière plan" de notre prière. Elle peut la gêner et la freiner... Oui, se prendre pour le bon Dieu, c'est croire qu'on n'a besoin de personne. Comme ces personnes qui se donnent pour idéal de n'avoir jamais besoin de personne. Dont la fierté est de s'en sortir seul. Mais en de nombreuses circonstances difficiles et plus encore dramatiques de la vie, on apprécie de pouvoir compter sur les autres, leur aide, leur amitié. La vie de nos villages le montre ! 

Or Dieu est l'inverse de cette caricature. Par Jésus, nous savons comment est Dieu. Il a besoin de relation. Il est dialogue. Amour. Il a même envoyé Jésus recréer de bonnes relations avec l'humanité. Dieu est charité profonde qui rend l'Autre indispensable pour être soi-même. Le salut apporté par Jésus-Christ, c'est de nous faire découvrir que Dieu a besoin de nous, comme un Père, sans l'amour de ses enfants, est malheureux. La foi n'invite pas à l'autosuffisance et au repli, mais à l'ouverture et à la relation, à la communion. La foi chrétienne, c'est accepter d'être sauvé de nos enfermements, de nos chutes, de nos faiblesses, de nos étroitesses, par l'Amour de Dieu qui nous appelle, invite, et nous donne sans cesse un Avenir. 

Une messe n'est pas une juxtaposition de fidèles indifférents les uns aux autres. Elle est le Corps du Christ où chaque membre prend sa part pour que vive l'ensemble. Le croyant peut alors dire : "Je ne peux plus me passer ni des autres, ni de Dieu. Ils me sont précieux. Ils font partie de ma vie." Pas seulement parce que nous sommes blessés et faibles, mais parce que cela est le projet même de Dieu que ses enfants, la famille humaine, soient liés dans l'Unité, l'Amour et la Vérité.

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