Le corps, les apparences, l’image…

De multiples signaux reçus au cours d’une vie soulignent l’importance de notre corps et nous invitent à en prendre soin. A sa naissance, le bébé avertit de son arrivée au monde par un cri. Il manifeste jour et nuit son besoin d’être nourri auprès de parents qui s’empressent de le satisfaire à des heures régulières. L’enfant alors grandit peu à peu en découvrant son corps, ses membres, l’existence de ses organes, l’éveil de ses sens ; il se découvre une identité personnelle… Il en prend possession et en assure le contrôle. Ainsi il découvre que son corps devient le moyen privilégié de l’expression de ses sentiments par ses larmes, ses cris de joie et de souffrance, et par le langage et les attitudes qui expriment ses besoins et ses aspirations. Les parents sont attentifs à leur enfant dont le corps exprime le bien-être plus ou moins grand. Le corps humain traduit donc souvent en immédiateté l’état intérieur, ou alors il refoule et accumule des stress, des angoisses face à des interrogations, des quêtes de soi sans vraies réponses.

Dès l’entrée dans l’adolescence, tout enfant a besoin d’identifier les adultes à qui il peut, en confiance, sans réserves, poser ses questions dont les réponses l’aideront à fonder sa vie, à penser, se forger des convictions, échanger avec d’autres. Je pense à tout ce qui touche aux relations humaines, à l’affectivité et la sexualité, à la vérité par un attachement à l’objectivité vis-à-vis du réel. L’adolescent qui ne serait livré qu’à sa propre investigation de la sexualité humaine, en particulier sur les sites de pornographie, serait privé d’appuis et de conseils susceptibles de lui faire découvrir la nature humaine de ces domaines intimes. Ce qu’il découvre dans le rapport des corps est la plupart du temps violent et souvent dégradant, à l’opposé de l’amour, don réciproque, qu’il ressent confusément être ce que recherchent son corps et son cœur, son esprit.

Le corps a besoin d’être entraîné, développé, et rationnellement et moralement utilisé selon des objectifs définis. Or la drogue, la pornographie sont des tentations et des pièges qui peuvent blesser des jeunes livrés à eux-mêmes, privés d’adultes référents à qui se confier et sur qui s’appuyer. La multiplication des petits écrans sur les tablettes, smartphones et autres instruments d’accès libre à la pornographie est un réel danger pour les enfants et la jeunesse, pour leur développement harmonieux. Autant il est normal et naturel que des jeunes cherchent à s’informer, à connaître, à comprendre, afin de se découvrir eux-mêmes et en relation aux autres, autant il est gravement coupable de les induire en erreur dans ces domaines qui concernent le plus intime de l’être humain, jusqu’à risquer de tromper leur esprit et de pervertir leur cœur et leur âme.

Déjà dans l’Antiquité grecque le corps humain s’affichait et trimait pour montrer ses avantages physiques ; notre époque vit aussi de l’image que chacun donne de lui-même et que valorisent les moyens visuels de communication et les milieux du « spectacle ». Tout en sachant que les apparences physiques expriment pour une part l’identité des personnes, chacun n’est-il pas invité à en franchir les limites ? Car ce qui est visible et sensible, sur le moment perceptible, loin de nous satisfaire devrait plutôt nous inviter à entrer dans une découverte plus approfondie. Entre la méfiance et même le mépris pour les corps, leur beauté, leur santé et leur tendance à capter et enfermer les regards dans le physique, il y a bien sûr à établir des interconnexions entre le corps, le cœur, l’âme, l’esprit, la conscience morale, en attribuant à chacune de ces facultés une préférence et même une présidence hiérarchique. A la fin d’une célébration de funérailles, l’Eglise encense le corps pour remercier Dieu de lui avoir permis d’être un bon et fidèle « serviteur » et accompagnateur de l’existence terrestre.