Trente ans et trois ans...

Tout chrétien, de par son baptême, est invité à « caler » sa vie, son humanité, sur celle de Jésus qui nous est connue grâce aux évangiles. Le même chrétien est aussi appelé à diffuser et témoigner de Jésus auprès des frères et sœurs en humanité qui ne le connaissent pas et ne s'y intéressent pas tant leur propre vie et leur façon de la dérouler leur suffisent.

En effet parmi les incroyants on peut compter plusieurs catégories. Il y a les renégats, ceux qui ont rejeté toute religion, qui ont écarté et non pris à leur compte celle de leurs parents.

Il existe les athées qui s'appuient sur des courants philosophiques, d'autres sur les sciences qu'ils vénèrent comme la solution actuelle et à venir à tous les problèmes, tandis que d'autres, matérialistes, font des richesses économiques et financières le moteur de leur progression.

Il est aussi des gens adeptes de tel ou tel courant de pensée ou de posture individuelle devant qui la proposition chrétienne peut paraître étrange.

Aussi être missionnaire de Jésus-Christ et de son message exige-t-il déjà de notre part une connaissance des terrains humains où nous accomplirons cette mission. Autrement dit,  il faut d'abord accueillir, entendre et apprendre, se glisser avec douceur et bienveillance dans la vie des gens auxquels on s'adresse avant d'annoncer le Message dont nous sommes porteurs. Les 30 ans de Jésus à Nazareth et les 3 ans de sa vie publique devraient nous inciter nous-mêmes à veiller à la répartition de notre temps et à cultiver la patience et la persévérance.

Comment ne pas être lucides aussi sur les cultures dans lesquelles nos contemporains et nous-mêmes baignons chaque jour et qui nous influencent, parfois nous bombardent et nous pressent d'adopter des modèles de vie ou de pensées prétendument universelles! Je me risque à citer quelques aspects marquants de ces cultures, de ces façons de réfléchir et de ces motifs d'agir qui « arrosent » les sociétés du monde contemporain. La culture qui exige de tout voir, de tout montrer comme preuves de vérité. La place centrale et envahissante de la Raison qui donne aux sciences l'exclusivité de la vérité et même de l'objectivité. La liberté promue comme le droit pour tout individu de trouver en lui toutes ses raisons et ses façons de vivre, avec cette seule limite de ne pas empiéter sur les mêmes droits reconnus aux autres. Cette priorité donnée à la liberté individualisée avec la culture impérative de la tolérance ne contrarie-t-elle pas le besoin des chrétiens d'intervenir et de proposer la foi en Jésus qui vient résister et même parfois s'opposer à ce qui est si immodérément qualifié de progrès et de modernité ?

Si nous décidons de nous faire propagateurs de la foi en Jésus, nous allons aussi rencontrer la culture ambiante de l'efficacité, de l'utilité, quand nous inviterons à la prière et à la relation d'amour en Dieu Père qui le premier se lie d'amour avec nous, sans réserve et sans condition. Et ce monde marqué par l'immédiateté, le tout tout de suite qui tend à gommer le passé et occulte l'avenir. Et ce monde accroc des chiffres, des courbes de projection, des pourcentages, d'audimat, de suffrages électoraux, de performances économiques et financières, de concours et de diplômes accumulés, de résultats de sondages effectués qui deviennent à la longue des critères de vérité et d'objectivité et même des directives pour décider de choix et de conduites à suivre.

Ces obstacles et cet état de fait dans lequel évolue l'humain actuel ne doivent jamais décourager le chrétien qui veut aussi être témoin du Christ avec lucidité et volonté. A la suite des Apôtres et des premiers chrétiens qui se sont adressés à des publics diversement situés et positionnés, les baptisés que nous sommes se doivent d'adapter et parler les langages des gens sans rien ôter de la vigueur de l'Evangile « levain, sel et Lumière ».