Si Dieu n'existe pas…
Si Dieu n'existe pas, il n'est aucune instance ni référence qui transcende le vivre ensemble humain. Chacun peut donc subjectivement inventer ses propres règles et lois à sa convenance, sans tenir compte de ses voisins. Même les règles et lois dont un Etat se dote peuvent lui paraître relatives et circonstancielles, puisqu'elles n'ont pas la garantie universelle. Qui peut fédérer, à qui se référer, à quoi s'accorder, autant de questions sans réponses s'il n'y a pas de loi divine, mais seulement des normes créées par des volontés d'hommes.
Si Dieu n'existe pas, la nature humaine peut-elle exister ? Concrètement, cela induit l'idée que l'homme d'ici et celui qui est lointain pourraient être très différents, puisque conditionnés par leur culture et leur environnement. Seul Dieu peut se montrer garant d'une nature humaine universelle et constante dans l'Histoire.
Si Dieu n'existe pas, il n'est bien sûr aucune trace de lui dans l'univers. Aucune organisation, diversité, complexité, évolution, aucune trajectoire et aucune progression ne doivent jamais être regardées comme des marques du créateur, mais toujours comme des fruits du hasard.
Si Dieu n'existe pas, la conscience individuelle dont chaque être humain est doté ne se sent appelée à discerner, choisir et s'engager que sous l'impulsion de ses propres désirs ou l'influence des conditions de son existence.
Si Dieu n'existe pas, l'intérêt d'une vie n'existe que le temps de la durée de ses années, puisque la mort vient tout interrompre et, pire encore, tout anéantir de cette vie, en totalité et à jamais.
Si Dieu n'existe pas, il n'est rien d'absolu ni de définitif, tout est à tout moment renégociable, variable, puisque toute promesse, tout engagement, toute alliance, n'ont pour appui et garantie que la parole humaine relative et subjective. La dignité humaine elle-même dépend du regard de celui qui en juge selon les critères de son choix, puisqu'il n'est aucune valeur absolue qui s'impose à tous et personne qui soit au-dessus pour la cautionner.
Si Dieu n'existe pas, en résumé, tout homme est livré à lui-même. A lui seul revient de juger de son comportement par rapport à celui des autres, puisqu'il n'est rien ni personne de transcendant. Le résultat de la négation radicale de Dieu, c'est la montée des individualismes et du subjectivisme, l'érosion de la cohésion sociale, puisque chacun est poussé à ne penser et ne vivre que pour soi. Livré à lui-même, l'homme fait des erreurs ; il rencontre des difficultés parfois insurmontables, des questions sans réponse, il finit par douter et sombrer dans la morosité, cultiver la méfiance, subir des divisions sans trouver la force et de suffisantes raisons de pardon et de réconciliation. Il n'a aucun recours supérieur, si Dieu n'existe pas.