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Les billets du Père Lucien Marguet
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23 octobre 2015

Toussaint

La Toussaint célèbre tous les saints, connus et inconnus, dans une ambiance d'automne. Les arbres se parent de multiples couleurs, avant de se dépouiller de leurs feuilles qui finiront par tomber jusqu'à la dernière. Les jours diminuent et l'obscurité recouvre peu à peu la luminosité des journées. Les frimas nous poussent à rechercher la chaleur des maisons. Nous passons de la vie en plein air à la vie intérieure. Tandis que nous voyons que la nature meurt progressivement sous nos yeux et perd ses parures de vie, nous nous sentons conviés à réfléchir sur le temps qui passe et à constater que tout a, inévitablement, une fin, et nous sommes invités à passer du visible et du sensible, perçus par nos sens, à l'invisible auquel donne accès une capacité exercée à l'intériorité et à la spiritualité.

Puisqu'ils ne sont plus parmi nous, ces saints arrivés au ciel et tous ces proches que la mort a physiquement éloignés, nous n'avons plus que le recours du souvenir et le cœur pour les garder en nous. Nous pouvons les retrouver en passant par la relation à Dieu, dans une communion qui franchit les limites de l'espace et du temps.

Or voilà qu'au milieu de la tristesse ravivée de les avoir perdus, l'Evangile du Bonheur éclate comme un éclair lumineux dans la pénombre automnale : heureux, oui, les pauvres de cœur, heureux les doux, heureux les purs, heureux les artisans de paix, heureux les justes... Ce message, prononcé sur une montagne près du lac, inaugure la vie publique de Jésus. C'est un programme, une charte, pour Jésus et pour ses disciples à sa suite, de la part du Père.

Or, aujourd'hui encore ce Message de bonheur nous parvient et nous atteint. Il est au cœur de cette fête de la Toussaint. Il vise à diffuser cette bonne nouvelle que le bonheur humain est possible et accessible à tous. N'entendez-vous pas ces gens de tout âge, hier comme aujourd'hui, demander comme ce verset du Psaume 4 : "Qui nous fera voir le bonheur ?" Vous le savez, vous ? Quand dites-vous que vous êtes heureux ?

Lors d'un entretien avec un journaliste, le Cardinal Lustiger disait à propos de la vie urbaine : "Le dernier recensement nous a appris qu'il y avait pratiquement autant de personnes qui vivent seules à Paris que de personnes vivant en famille. La grande ville si brillante et si bruyante est une ville de solitude, pour beaucoup un désert affectif..." Ainsi, la solitude serait aujourd'hui la pire des situations. Ne pouvoir compter sur personne. Ne se sentir utile à personne. Vivre et mourir seul, sans personne qui vous accompagne, vous aime et vous console !... Voilà quelque chose du malheur. Les moines ne subissent pas la solitude car ils l'ont choisie. Elle leur permet d'accueillir l'hôte intérieur. Ainsi les moines ne sont jamais seuls dans leur monastère. Il y a Dieu. Il y a les frères. Tous en silence.

Certes, la société s'est pourvue de toutes les parades et assurances, contre les catastrophes, le chômage, la maladie, les revers les plus imprévisibles ; il n'empêche que rien ne pourra jamais remplacer la relation humaine et ce besoin vital d'avoir du prix et de l'importance aux yeux des autres. Le bonheur est dans la relation aux autres, à Dieu. Quand la vie a de la saveur et du sens, fusse quand il faut traverser des difficultés, s'il y a une sérénité et une paix dans le cœur, alors le bonheur intérieur est au rendez-vous.

Oui, le bonheur authentique, celui qui a de la durée et n'est pas entamé par les aléas de l'existence, ne peut être qu'intérieur, combien même le climat est à la morosité, pourvu que chacun ait des ressources en lui pour s'éclairer et se réchauffer. Car la culture actuelle tend à nous déposséder de cette source de joie qui jaillit en nous. Donnez-moi votre cœur, vos sentiments, donnez-moi votre argent, je me charge de tout ! Un bonheur clés en mains !.. nous dit cette culture publicitaire. C'est le règne de la consommation, de la distraction (pour oublier), des bonheurs en kit, des produits surgelés fabriqués par d'autres, des comportements standard et de la pensée unique obligatoire, du paraître plus important que l'être, du souci de l'image de soi et de l'image qu'on donne.

Le bonheur ne s'achète pas dans les rayons d'un supermarché. Il est produit au fond de soi dans le rapport sain et libre que nous avons aux choses, aux événements et aux autres. Qu'il fasse beau ou qu'il pleuve, que le chemin soit creusé d'ornières et obstrué d'obstacles ou plus facile à parcourir, le bonheur peut être là, dans la présence reconnue du Christ. En soi. Pace que la foi donne sens. Parce que l'on est entouré. Parce que l'on se sent porté. Malgré tout. Plutôt au travers tout !

Face aux bonheurs préfabriqués, est-il d'autre choix que celui de résister, que de choisir soi-même ? Et surtout que de cultiver soi-même sa vie spirituelle dans laquelle la réflexion, la prière, l'Evangile, les sacrements, et en particulier la Messe, forment des affluents qui deviennent en nous un vrai bonheur de vivre qui irrigue nos vies. Nos vrais bagages pour le chemin vers le bonheur sont la Foi, l'Espérance et l'Amour.

C'est le Message de la Toussaint. Ces gens de tout âge et de toute condition, de toute époque et de tout continent, connus ou inconnus, célèbres ou dans l'ombre, souvent après détours, ont accroché leur vie au Christ et à l'Evangile. Aujourd'hui encore, le Christ nous propose de le suivre sur ce chemin qui passe par la Croix du don de soi et conduit vers la vie. Les Béatitudes en sont l'itinéraire à suivre...

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