"De quoi se mêle l'Eglise dans un pays régi par la loi de séparation de 1905 ?"
C'est là une phrase entendue à la radio à propos de
l'intervention du Pape Benoît XVI sur le respect de la dignité de
"l'étranger", dans laquelle le Pape a formulé une "invitation à savoir accueillir les
légitimes diversités à la suite de Jésus venu rassembler les hommes de toute
nation et de toute langue". J'ai également entendu un autre auditeur souligner
comme une contradiction de la part de l'Eglise le fait de dénoncer l'avortement
et de défendre l'intrinsèque dignité de tout être humain ! Alors qu'il existe
un lien évident, car, dans les deux cas, il s'agit de la vie d'êtres humains
sans moyens de faire valoir leurs droits, complètement dépendants du bon
vouloir d'autres humains.
Des gens tentés de reprocher au Pape de se prononcer
sur ce thème de société sont d'ailleurs parfois les mêmes que ceux qui
ferraillent contre Pie XII pour n'avoir pas dénoncé le projet d'anéantissement
des Juifs par le nazisme. L'Eglise est une multinationale, ou plutôt une
transnationale, qui a des réseaux et des membres actifs et influents dans le
monde entier. Pourquoi devrait-elle s'imposer de se taire quand elle est témoin
de désordres économiques, d'injustices criantes, d'atteintes flagrantes aux
droits universels de l'homme, de choix et de projets pervers et dangereux ?
Alors que tout le monde admet que des groupes les plus divers ont un droit
légitime à faire part de leur point de vue, fût-ce contre une pratique
politique, pour quelles raisons l'institution Eglise devrait-elle se taire sur
ces sujets pour des raisons de laïcité ?
Au contraire, l'Eglise doit se sentir tout le temps
libre d'exprimer ses questions et ses conseils, de dénoncer et d'annoncer,
selon ses normes évangéliques, parce qu'elle bénéficie de la séparation des
pouvoirs. Elle est complètement dans son rôle qui ne se réduit nullement à la
sacristie ! A chacun sa mission n'induit pas que l'on impose le silence à
l'autre. La démocratie suppose le débat. Et celui-ci suppose la liberté donnée
à tous de faire valoir leur point de vue. L'Eglise peut avoir son mot à dire
sur des sujets dans lesquels les responsables politiques ont, eux, à prendre
des décisions et conduire des actions.
Le Pape a ainsi terminé sa petite intervention : "Chers parents, puissiez-vous éduquer
vos enfants à la fraternité universelle"…